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Attractivité du métier d’enseignant : une revalorisation est-elle nécessaire ?

Le métier d'enseignant souffre d'une faible attractivité. La revalorisation du statut de professeur des écoles semble nécessaire : on vous explique !
30/05/20237 mins
Par Hugo Messina
La revalorisation des enseignants : les solutions

La question du statut des professeurs a rarement été autant d’actualité. Après plusieurs concertations entre le ministère de l’Éducation nationale et les principaux syndicats d’enseignants entre janvier et mars 2023, une revalorisation du métier va intervenir dès la rentrée prochaine. En réalité, les débats se concentrent particulièrement sur une question : comment attirer vers le métier de professeur ? 

Mauvaise image du métier, place dans la société ou encore difficulté du concours : plusieurs idées reçues circulent. Les potentiels candidats semblent plus frileux à envisager une carrière dans l’enseignement… à raison ? La rédaction de Hupso s’est penchée pour vous sur cette question brûlante !

« Un vrai bonheur de faire ce métier », pourquoi devenir enseignant ? ?‍?

« Super valorisant et enrichissant », « beaucoup de positif », « un vrai bonheur de faire ce métier »… C’est ce que vous entendrez si vous demandez à Marjolaine, professeur des écoles depuis deux ans et ancienne apprenante chez Hupso, de décrire son nouveau métier. Cette ancienne responsable de production dans l’agroalimentaire a décidé de suivre sa passion, restée dans un coin de sa tête depuis plusieurs années : « j’avais pensé depuis longtemps à devenir professeur des écoles, c’était un peu un rêve de petite fille. » 

Après avoir préparé (et brillamment réussi, bravo Marjolaine !) son Concours de Recrutement de Professeurs des Écoles (CRPE), elle enseigne avec enthousiasme au sein d’une école primaire, à Marseille (Bouches-du-Rhône, France). « Je suis pleinement épanouie avec ma classe de CE2/CM1. C’est un vrai bonheur d’aller à l’école chaque matin et de retrouver mes élèves. Chaque journée est enrichissante. Je me sens utile et j’ai vraiment l'impression de leur apporter des choses. Je suis très heureuse de leur permettre de grandir et de progresser », raconte cette jeune professeur.

Un point de vue partagé par Gilles Jean, responsable départemental du SNUIPP-FSU 06 (Alpes-Maritimes), le syndicat unitaire des professeurs des écoles, majoritaire dans les écoles maternelles et élémentaires en France. « Voir progresser un enfant, lui apprendre à lire par exemple, c’est une satisfaction personnelle », explique volontiers cet ancien enseignant.

En écoutant le témoignage de Marjolaine et de Gilles, il est assez évident que l’enseignement s’affiche encore comme une véritable vocation. En effet, malgré une image détériorée dans les médias, le métier de professeur des écoles semble encore faire rêver. 

D’ailleurs, un sondage Ipsos pour la Cour des comptes*, publié en février 2023, montre que 57 % des étudiants français estiment cette profession attractive. Plus de la moitié des interrogés affirment même qu’il s’agit d’un métier prestigieux (52 %).

Parmi les sondés, une carrière de professeur des écoles assure de multiples avantages. Par exemple, beaucoup d’entre eux sont attirés par la transmission d’un savoir et de connaissances. Participer à l’éducation des élèves, enseigner et transmettre des valeurs aux jeunes enfants… Bien souvent, ces fonctions sont les sources de motivation numéro un pour la plupart des candidats au CRPE. 

En parallèle, ce métier permet une certaine autonomie de travail mais aussi plus de stabilité. Évidemment, on pense à la sécurité de l’emploi, garantie par le statut de fonctionnaires, et aux congés, calqués sur le calendrier scolaire (et donc connus à l’avance), permettant d’organiser sa vie de famille.

*Source : sondage Ipsos « Facteurs d’attractivité et de rejet du métier d’enseignant chez les étudiants », réalisé en mai 2022 pour la Cour des comptes.

Professeur des écoles : une carrière de moins en moins envisagée ? ?

Malgré ces aspects positifs, le métier de professeur souffre clairement d’une pénurie de professionnels qualifiés. Rien qu’à la session 2022 du CRPE, seulement 8 158 candidats ont été admis… sur 10 600 postes disponibles ! « C’est incontestablement un beau métier mais dont l’image s’est abîmée au fil des années », regrette Gilles Jean, qui observe des difficultés de recrutement ces dernières années.

Pour en savoir plus sur le nombre de candidats :  Les statistiques du CRPE

Ce déficit d’attractivité se ressent également chez les étudiants. Selon le sondage Ipsos, cité précédemment, 59 % d’entre eux pensent que le métier d’enseignant est moins attractif qu’il y a dix ans

Parmi les raisons évoquées, un déficit d’image dans la société revient assez fréquemment. En fin de compte, les opportunités professionnelles paraissent plus intéressantes ailleurs, notamment dans le secteur privé. De plus en plus de personnes privilégient ces carrières, avec des perspectives d’évolution souvent plus rapides et attractives. 

Le responsable syndical le reconnaît avec peine : « de nos jours, les professeurs des écoles sont noyés dans les métiers du privé et l’école est de moins en moins sacralisée. Le statut du professeur est moins reconnu. Cela explique en partie les difficultés de recrutement de ces dernières années. » La valorisation sociale de ce métier est donc moins forte qu’auparavant, lorsque le professeur jouait un rôle primordial dans la commune, aux côtés du maire.

Cette image s’est abîmée au fil des années à cause de plusieurs paramètres. Au premier plan, la rémunération des professeurs. Si l’augmentation des salaires est officiellement actée, il aura fallu attendre 2023 pour que l’État décide de mieux rémunérer l’enseignant. Ainsi, 78 % des étudiants pensent encore qu’un professeur débutant commence en dessous de 1 800 euros nets. Au contraire, seulement 5 % des interrogés supposent que le salaire d’entrée s’élève à 2 000 euros nets (ce qui sera le cas dès septembre 2023). 

D’un autre côté, plusieurs autres soucis récurrents ont entaché l’enseignement (développement de classes difficiles, manque de moyens sur certains territoires, gestion du comportement des élèves souffrant de troubles d’apprentissage, etc.).

La solution du gouvernement : revaloriser la place de l’enseignant ?

Face au constat alarmant du manque de candidats, dynamiser le métier d’enseignant est devenu une priorité du gouvernement. D’ailleurs, le budget du ministère de l’Éducation nationale en 2023 a été fixé à 3,6 milliards d’euros. 

Le 6 mars 2023, date de la dernière séance de débats avec les syndicats de l’enseignement, les mesures prises pour le statut du professeur ont été finalement dévoilées, notamment : 

  • +10 % sur les rémunérations pour l’ensemble des professeurs, psychologues de l’Éducation nationale et CPE (par rapport à 2020) 
  • 2 000 euros nets par mois, garantis à tous les professeurs en début de carrière, dès leur prise de fonction
  • Doublement de l’Indemnité de Suivi et d'Accompagnement des Élèves (ISAE)
  • Doublement de l’Indemnité de Suivi et d’Orientation des Élèves (ISOE)
  • Mise en place d’un pacte sur la base du volontariat, pour s’engager sur de nouvelles missions et percevoir une rémunération plus élevée (remplacement de courte durée, suivi individualisé d’élève, accompagnement à l’orientation et à l’insertion professionnelle, intervention dans des classes de 6ème, etc.)

Ce projet a pour but de « garantir l’attractivité du métier et mieux reconnaître le travail réalisé », selon l’actuel ministre de l’Éducation nationale, Pap N’Diaye. L’idée serait de mieux considérer le travail des professionnels de l’éducation, pour assurer un meilleur fonctionnement de l’école pour les élèves et le corps enseignant. 

Dans le même temps, la Cour des comptes émet plusieurs recommandations dans son dernier rapport pour attirer plus de candidats, par exemple : 

  • Ouvrir plus de postes au troisième concours du CRPE (pour rappel, il s’agit de la voie d’accès réservée aux personnes justifiant d’au moins huit ans d’activité professionnelle, sans condition de diplôme)
  • Prévoir une semaine de formation pour les enseignants contractuels (ceux qui ne passent pas le concours) pour mieux préparer à la réalité et aux enjeux du métier
  • Mettre en place des mesures et moyens financiers spécifiques pour les écoles des académies moins attractives (Versailles et Créteil notamment)

Qu’est-ce qu’on en pense chez Hupso ? ?

Depuis 2016, on s’engage tous les jours aux côtés des « Indispensables ». Ces personnes qui jouent un rôle tellement important dans la société, que se passer d’eux serait inenvisageable. Le professeur des écoles fait sans aucun doute partie de cette catégorie. Il nous semble donc logique de défendre la place de l’enseignant et son image dans l’opinion publique. 

Bien entendu, les fonctions du professeur méritent largement d’être considérées à leur vraie valeur. Faire progresser des élèves, susciter leur intérêt ou encore gérer des situations imprévisibles en classe sont des missions parfois stressantes et prenantes. Récompenser les professeurs les plus investis semble être nécessaire, pour faire émerger un sentiment d’utilité au sein de la profession. 

La revalorisation des rémunérations, bien que tardive, est la bienvenue. En revanche, comme le rappelle Gilles Jean : « il faut que la revalorisation soit absolument uniforme, qu’elle touche tout le monde. On ne peut pas détruire le collectif de travail dans les écoles, où certains pourraient faire des heures supplémentaires alors que d’autres non. » La question salariale demeure donc un levier important pour l’attractivité du métier. 

De manière plus générale, améliorer l’image de l’enseignement dans la société française est nécessaire. Des solutions permettraient d’ailleurs de soulager le quotidien des professeurs et donner plus envie de se lancer dans cette voie (réduire le nombre d’élèves par classe, accompagner l’enseignant en cas de difficultés, faciliter la collaboration entre professeurs, etc.). 

Beaucoup imaginent aussi un métier assez monotone, se répétant à chaque rentrée scolaire. Mais comme explique Marjolaine, l’environnement de travail évolue fréquemment : « Cette année, en élémentaire, j’ai des élèves qui sont beaucoup plus grands, le travail est complètement différent. Ils sont très curieux, avec la soif d’apprendre et d’en savoir plus. »

Pas le temps de tout lire ? À retenir ! ?

  • Le métier de professeur des écoles attire moins de candidats (-38 % de candidats entre 2021 et 2023)
  • La baisse d’attractivité est principalement due à : 
    • Une mauvaise image du métier dans la société
    • Un manque de reconnaissance du métier de professeur
    • Une méconnaissance du métier par les candidats potentiels
    • Une « peur » du concours 
  • L’enseignement reste une voie privilégiée par les étudiants (68 % n’excluent pas ce choix de carrière)
  • Le gouvernement prévoit une revalorisation salariale des professeurs (2 000 euros nets dès le début de carrière)
  • D’autres leviers doivent être actionnés (récompenser les initiatives, mettre en lumière les aspects positifs de la profession, donner plus de flexibilité aux professeurs, etc.)

 

La question de l’attractivité du métier d’enseignant vous paraît désormais plus claire ? Gardez en tête que cette profession figure aujourd’hui parmi les « métiers en tension », pour lesquels les opportunités professionnelles sont nombreuses. 

Attention, la voie pour devenir professeur reste tout de même sélective. Le niveau du CRPE, même s’il attire moins de candidats qu’il y a dix ans, est encore élevé. Se préparer est devenu presque indispensable, quel que soit le concours tenté (externe, interne ou troisième concours). Pour ces raisons, on est convaincu qu’une préparation au concours est votre meilleur allié pour entamer une carrière dans l’enseignement.

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Hugo MessinaRédacteur de contenus

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